Magazine Journal intime

Musique !

Publié le 19 février 2020 par Anned

Dans ma paroisse, je suis confrontée depuis plusieurs années à une difficulté.

J'aime chanter et je prends des cours de chant depuis plus de 10 ans. Pendant longtemps, je n'ai travaillé avec ma prof de l'école de musique de la ville que de la musique vocale sacrée, puis j'ai un peu élargi mon répertoire à l'opéra, et occasionnellement à la chanson française contemporaine.

Je fais partie de l'équipe liturgique de la paroisse, et c'est donc avec une technique vocale bien plus assurée que je guide, un dimanche de temps en temps, le chant de l'assemblée lors de nos messes dominicales.

En Allemagne, la musique tient une grande place et les écoles de musique sont dotées de moyens à faire pâlir d'envie les musiciens de l'autre côté du Rhin. C'est ainsi que nous avons régulièrement l'occasion de nous produire en public, pour nos proches en général.

La musique vocale sacrée constituant une part importante de mon répertoire, il m'a semblé naturel, il y a plusieurs années déjà, de chanter aussi de temps à autre (2-3 fois dans l'année ?) pendant la messe paroissiale, à l'offertoire ou pendant la communion par exemple, toujours avec l'accord de notre curé, parfois en duo avec une autre paroissienne qui partage ma passion. De nombreuses personnes apprécient ces moments de méditation musicale et nous en remercient, mais une minorité est totalement contre, et le fait savoir avec véhémence, mais jamais directement.

Reproche : nous nous mettons en avant, et c'est mal venu. Impossible de discuter avec ces personnes, aucun argument ne les atteint. Les organistes bénévoles qui accompagnent à tour de rôle les chants de l'assemblée, et ne boudent pas leur plaisir de jouer une fugue de Bach à l'offertoire ou à la fin de la messe, se mettent eux aussi en avant, alors, mais de leur part, c'est acceptable ? Idem pour tel paroissien flûtiste, ou tel autre trompettiste ?

Et quid de la diversité du peuple de Dieu traduite dans la musique qui accompagne nos assemblées dominicales ? Une chorale africaine de temps à autre, c'est très bien, mais deux solistes pour un morceau de Mendelsohn, ça ne passe pas ?

Je ne comprends pas non plus pourquoi la musique sacrée n'aurait pas sa place de temps à autre pendant la messe dominicale d'une paroisse lambda comme la nôtre. Pourquoi les pièces sacrées composées par Mozart, Haendel, Bach et tant d'autres seraient-elles cantonnées aux salles de concert, voire à la Basilique St Pierre, ou aux obsèques d'un ancien président de la République comme cela a récemment été le cas pour le Requiem de Gabriel Fauré ? (J'adore chanter son Pie Jesu.)

Mais ce qui motive ce billet, c'est la manière désastreuse dont ce différend récurrent est géré par le curé, et qui est révélatrice de ce que le cléricalisme peut parfois engendrer de toxique. J'aurais aimé qu'il dise une fois pour toutes aux personnes auxquelles cela déplaît que deux ou trois fois par an, ce n'est pas beaucoup, et qu'au nom de la diversité des goûts et des modes d'expression dans la communauté, sans parler de la majorité silencieuse qui apprécie, il y était ouvertement favorable. Il ne l'a jamais fait.

Il ne "gère" pas, ou très mal, les différends, voire les conflits, entre personnes. Il ne sait pas le faire, ou il ne veut pas le faire. Je ne sais pas. Mais comme il est la tête de cette paroisse, que tout passe par lui, et que c'est loin d'être l'unique situation de ce type où il n'agit pas, cela crée beaucoup de frustrations. Tout groupe humain connaît des désaccords en son sein, et c'est sain !

Cette passivité et ce refus de s'impliquer ont pour conséquence que nous sommes un certain nombre de baptisés bénévoles, à nous être mis les uns après les autres en retrait de nos engagements pour la paroisse, après quelques expériences de ce type, lassés que l'emportent systématiquement ceux qui vocifèrent le plus.

Les paroisses "à la française" comme la nôtre sont organisées autour d'un curé omniprésent et omnipotent, qui est supposé cumuler les compétences pour tous ses rôles, de la théologie à la communication en passant par écoutant, DRH, logisticien, et j'en passe. Et c'est bien là le problème, car il est impossible d'avoir toutes ces compétences, d'autant plus qu'elles ne sont pas enseignées dans les séminaires - en tout cas elles ne l'étaient pas à la génération de notre curé.

L'ironie de ce différend musical est qu'un de ceux que ces interventions de solistes pendant les messes irritent, est, comme moi, membre de l'équipe liturgique. La dernière fois qu'il s'est occupé des chants d'une messe, c'était il y a plusieurs mois pour une fête paroissiale. Depuis, il n'a pris en charge aucun dimanche ordinaire, ni ne prévoit de le faire dans les mois qui viennent si j'en crois nos plannings. Sympa pour les collègues qui eux, prennent une fois par mois sur leur dimanche en famille... Mais il a fait en sorte de me débarquer en douce et de me remplacer pour une prochaine fête paroissiale que je devais assurer. Et dire qu'il me reproche de me mettre en avant... Encore un virtuose du faites-c'que-j'dis-pas-c'que-j'fais !

Autistiquement vôtre,

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