Mercredi 4 mars
10h : Splendeurs et misères de la vie de chercheur… J’ai décidé de mettre sous forme d’articles des conférences données il y a quelques semaines, mais ce qui devrait être promenade de santé pour le rédacteur chevronné que je suis s’avère parcours du combattant pour la tanche en informatique que je suis également ! Non seulement les revues universitaires ne sont pas fichues d’avoir toutes les mêmes normes (on se demande à quoi ça leur sert à part à se distinguer à tout prix) mais, par-dessus le marché, certaines d’entre elles ont des exigences inhumaines : quelle importance ça peut avoir pour le lecteur, le nombre de pages d’un livre et son ISBN ? Pendant mes études, je me suis cassé la tête à assimiler des règles de mise en page et de présentation des références bibliographiques, que je trouvais déjà passablement tartignolles à l’époque, et maintenant que je suis dans la vie professionnelle, je dois passer mon temps à mettre de côté ce que j’ai appris et à réapprendre d’autres normes à chaque fois que j’ai le malheur de vouloir diffuser le résultat de mes travaux ! C’est bien la peine de se former ! Tout ça pour en arriver à faire gratis le boulot qui devrait échoir à un metteur en page formé et diplômé pour ça ! Le chômage de masse, c’est aussi le travail gratuit de masse ! Maman, pourquoi ton fils a-t-il voulu devenir un intellectuel ?
13h30 : En sortant de chez moi pour honorer un rendez-vous, je me procure le dernier Côté Brest, avec mon article sur le « challenge Champollion ». C’est toujours une fierté pour moi de remplir une page entière du journal, surtout quand c’est pour parler d’un sujet intéressant. Mais comme je ne me borne pas à lire mes propres textes, je jette un regard sur la page suivante où sont présentées les propositions des candidats aux municipales pour la sécurité. Je découvre à cette occasion que la candidate du RN se nomme Renée Thomaidis (sans commentaires), qu’elle propose de mettre en place la vidéosurveillance (c’est déjà fait, co****** !), de la confier à une police municipale et de faire pression à l’état pour augmenter les effectifs de la police nationale et, bien sûr, « lutter contre l’immigration massive » (comment veux-tu lutter contre quelque chose qui n’existe pas ?). Bref, toujours plus de flics et les étrangers dehors : l’extrême-droite n’a pas changé d’un poil depuis 1944 ! Ceux qui me disent le contraire sont des imbéciles pusillanimes ou des manipulateurs crapuleux ! Et on voudrait que je fasse montre d’empathie envers ceux qui défendent ces idées pourries ! Oh, mais je sais, j’ai eu accès à la culture et aux étudies universitaires, « donc » je suis un intellectuel, « donc », je suis un sale privilégié et je n’ai « donc » pas le droit à la parole, comme l’a si bien dit Pierre Carles à propos de Clément Méric ! Désolé pour ceux qui auraient préféré que je fasse une argumentation raisonnée, mais j’en ai ras le bol de devoir toujours ressasser les mêmes arguments face au sempiternel amalgame entre immigration et déliquance : depuis que j’habite à Lambézellec, je croise des gens qui parlent arabe en pleine rue tous les jours et je n’ai jamais été agressé ! Alors qui croit encore à cet amalgame débile (un pléonasme excusez-moi) à part, justement, ceux qui ne voient jamais un « étranger » ? Je suis épuisé…