La redécouverte de l’objet « téléviseur » n’est pas le moindre des paradoxes de cette situation. On nous explique, depuis l’avènement des smartphones, que ce vieux média qu’est la télévision n’est guère plus qu’une lucarne « à la papa » dédiée aux seniors. Même la ménagère de moins de 50 ans n’est plus un mythe marketing crédible, car elle acquiert désormais ses chaussures sur sarenza.com via sa tablette, et, de ce fait, n’offre plus de cerveau disponible aux annonceurs de TF1.
Mais quand Canal + décrypte ses programmes pour quelques semaines, autant le dire, c’est une opportunité supplémentaire tellement délectable en ces temps de confinement. Toutefois, le cador, le patron, c’est Emmanuel Macron. Plus regardé que Kylian Mbappé et Zinédine Zidane réunis, plus attendu que Nikos dans The Voice, bref, le champion du monde de l’audience, c’est lui. Non mais, il est déjà le plus jeune Président élu, veut-il réellement battre tous les records ? Qu’il nous laisse deux ou trois trucs pour crâner quand même !
Plus de 35 millions de téléspectateurs toutes chaînes confondues devant leur écran de télé le lundi 16 mars, soit 86,6 % du public selon Médiamétrie. Le plus simple serait de compter ceux qui n’étaient pas là pour le voir. Impossible d’y échapper, car quand près de 10 millions d’entre nous le dévisagions sur France 2, 68 000 personnes regardaient sa déclaration sur L’Équipe TV. T’es peinard en train de te mater une rediffusion d’un match où le PSG atomise l’OM, et bien non, l’avant-centre, celui qui se la joue perso et qui ne fait pas de passe avant de marquer un but : c’est Emmanuel Macron.
Ah, ces chers rituels retrouvés de « Et elle est où la télécommande ? » ou le célèbre : « Baisse le son ! », comme ils m’avaient manqué. Et comment ne pas évoquer le débranchement méthodique mais approximatif de la PlayStation pour parvenir à faire un raccordement convenable, tout cela afin d’obtenir le tunnel de publicités pour des voitures que l’on ne pourra pas essayer pendant quelque temps encore.
Non, mais le pire, c’est quand même que tu es en train de grignoter ton paquet de noix de cajou avec ton petit apéro du soir, bien calé devant le message du Président, et tu as Bernard Canetti qui vient, juste avant l’allocution, ajouter à ton emprisonnement un sentiment de culpabilité.