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Et bien au revoir !

Publié le 06 décembre 2020 par Legraoully @LeGraoullyOff
Et bien au revoir !

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Cette semaine, Valéry Giscard d'Estaing nous a quitté à l'âge de 94 ans, à peine plus d'un après la mort de Jacques Chirac ; son décès ne provoque cependant pas la même émotion que celle de son rival, d'une part parce que les Français d'aujourd'hui ont assez de problèmes avec leur président actuel pour s'appesantir sur un de ses prédécesseurs et, d'autre part, parce qu'il faut bien reconnaître qu'objectivement, " VGE " n'a pas vraiment réussi à nouer avec le peuple une relation aussi forte que celle qui liait " Jacquot " à la France profonde : les électeurs l'ont tout de même désavoué assez nettement en 1981 et il laisse le souvenir d'un chef d'Etat hautain et méprisant, il ne faut pas le nier. Le seul qui doit sincèrement le regretter (et encore), c'est peut-être Nicolas Sarkozy qui est désormais le seul ancien président vivant à avoir été chassé du pouvoir par les Français - rappelons que François Hollande, lui, a renoncé de lui-même à se représenter et a donc su éviter cette humiliation.

Mais bon : il a quand même été président de la République, il n'y a rien de scandaleux à ce qu'il lui soit rendu officiellement hommage à l'occasion de ses obsèques. Alors d'accord, tout comme pour Chirac l'an passé, ravalons un instant nos rancunes, et essayons de trouver au moins un aspect positif du septennat de Giscard d'Estaing. Certains choisiraient spontanément la légalisation de l'avortement, qui a donné aux femmes françaises la liberté d'interrompre une grossesse non désirée et leur a permis de recourir à cette opération pour le moins pénible (car on n'avorte jamais de gaîté de cœur) dans des conditions sanitaires dignes de son nom et non plus dans des ateliers clandestins où elles risquaient leur propre vie. Certes, c'est effectivement un progrès, mais il ne faut pas perdre de vue que le mérite de cette loi revient de droit à Simone Veil qui en fut l'artisane et qui a dû compter sur les voix de la gauche pour l'imposer contre la volonté d'une partie de sa propre majorité - ce qui n'empêchait pas les femmes de députés ou de sénateurs de se faire avorter en clinique privée, mais c'est une autre histoire.

En fait, si je devais retenir un bon point dans le bilan politique de Valéry Giscard d'Estaing, ce serait l'abaissement de la majorité civile à 18 ans : ça n'a l'air de rien car ça parait tout à fait naturel aujourd'hui, mais il ne faut pas perdre de vue que cette mesure est intervenue six ans seulement après les événements de mai 68, autant dire une seconde à l'échelle de l'histoire ! En ce temps-là, les braves gens avaient encore peur des jeunes à cheveux longs qui étaient descendus dans la rue pour élever des barricades et balancer des pavés sur les CRS et qui continuaient à inquiéter la vieillesse en lisant Charlie Hebdo ou en préférant les rockeurs anglo-saxons à Tino Rossi et Mireille Mathieu : leur donner la majorité, donc le droit de vote et toutes les autres libertés dont on ne bénéficiait jusqu'alors qu'à partir de 21 ans, voilà qui a sûrement dû faire frémir plus d'un lecteur du Figaro, qu'il l'avoue ou non !

C'était donc une mesure plutôt courageuse pour l'époque, et le fait qu'elle soit aujourd'hui considérée comme allant de soi la justifie pleinement a posteriori : qui accepterait encore, aujourd'hui, qu'une jeune personne qui viendrait d'obtenir son bac à 18 ans soit toujours tenue de demander l'autorisation de ses parents pour faire quoi que ce soit, surtout à une époque où une adolescente de 13 ans peut réussir à faire entendre sa voix dans le monde entier ? Donc oui : rien que pour ça, je reconnais que Valéry Giscard d'Estaing n'a pas été le plus mauvais de nos présidents. De toute façon, pour l'obtention de ce titre, la concurrence est rude...


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