Le journal du professeur Blequin (151)

Samedi 20 mars

11h : Le Télégramme assène à la une que 2.000 personnes vaccinées en Bretagne ont développé des effets secondaires… Bon, prenons les choses dans l’ordre. Et d’une : ça représente moins de 0,5 % des personnes vaccinées. Et de deux : l’immense majorité de ces effets secondaires sont bénins. Et de trois : il n’est pas prouvé que tous ces effets indésirables soient systématiquement dus à l’injection du vaccin. Et de quatre : atteaper une trombose quand on est vieux, c’est triste, mais ça n’a rien de bizarre. Et de cinq : de toute façon, si c’est le prix à payer pour  retourner au café, au restaurant, au théâtre et abandonner ce foutu masque, je suis prêt à la payer au prix fort ! Alors sauf le respect que je leur dois, si nos prestigieux collègues pouvaient arrêter de compromettre la sortie de crise avec un sensationnalisme de bas étage, je leur en serais infiniment reconnaissant !

Lundi 22 mars

16h30 : Après un dimanche sans histoires, j’ai rendu visite à un ami pour parler d’un projet ambitieux. En reprenant le bus pour Guilers, je retrouver par hasard une vieille dame que je connais depuis l’enfance : celle-ci me dit qu’elle n’a pas vu ses petits-enfants depuis des mois… Il y en a des milliers dans son cas et ça me fait pleurer. Pas vous ?

Mercredi 24 mars

12h : Déjeuner chez une collègue et amie, immobilisée depuis 45 jours suite à un accident stupide qui lui a valu une fracture au pied : elle vient à peine de quitter le fauteuil roulant, on lui a posé une attelle. Elle reste malgré tout souriante et optimiste et a préparé un délicieux repas à l’occasion de nos retrouvailles : j’aimerais avoir sa force morale… En tous cas Covid ou pas, il ne fallait pas compter sur moi pour me retenir de l’embrasser ! Quand je pense que depuis qu’elle est en arrêt, elle n’a reçu que trois visites, dont la mienne, en tout et pour tout ! Mais dans quel monde on vit ?

Jeudi 25 mars

16h30 : Bertrand Tavernier est mort. La connerie a encore perdu un ennemi…

Vendredi 26 mars  

13h15 : Je reprends le car pour rentrer du Faou, où je m’étais rendu pour répondre aux question de Radio Evasion : le chauffeur me dit qu’il n’accepte pas la visière transparente qui me sert de masque ! Voilà cinq mois que je la porte et personne ne m’avait encore fait de remarque ! Je proteste donc énergiquement, lui disant que le chauffeur du car dans lequel j’étais monté pour l’aller n’avait pas fait d’histoires : il me laisse entrer, non sans maugréer qu’il n’est pas tenu d’accepter, de même que les autres passagers… Voilà un autre effet pervers de la « crise sanitaire » : elle a donné à la mesquinerie un terrain supplémentaire pour s’épanouir.

Samedi 27 mars

21h : Désolé, maman, je n’aime pas Line Renaud, cette rescapée des années Chirac qu’on vend en bibelot aux Américains qui croient encore que Montmartre est un quartier populaire. Désolé, maman, je n’aime pas Jean-Paul Gaultier, ni même d’ailleurs aucun autre de ces « grands couturiers » qui fabriquent des oripeaux hors de prix et immettables pour des pétasses de luxe. Désolé, maman, je n’aime pas Nolwenn Leroy la godiche made in TF1, la fille cachée de Céline Dion et de Roselyne Bachelot qu’on vend aux Parisiens qui ne savent pas apprécier la musique celtique sans sauce variétoche bien sirupeuse. Désolé, maman, je n’aime pas Muriel Robin avec ses bons sentiments, son humour émasculé et les téléfilms insipides dans lesquels elle a joué, n’en déplaise à Papa Bedos. Désolé, maman, je n’aime pas le Sidaction, ni même d’ailleurs aucune autre opération caritative : quand je vois avec quelle rapidité on a trouvé l’argent pour financer la recherche d’un vaccin contre le Covid-19, j’en ai marre que ce soit toujours à nous, les petites gens, qu’on demande de mettre la main au portefeuille pour résoudre tous les fléaux de la Terre !