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Le journal du professeur Blequin (209)

Publié le 22 juillet 2022 par Legraoully @LeGraoullyOff

Le journal du professeur Blequin (209)Samedi 16 juillet

17h40 : En revenant de la plage, j’étais bien décidé à en profiter pour passer dans une boutique où, m’a-t-on annoncé ce matin par SMS, un colis que j’attends depuis déjà deux semaines vient d’être déposé. Et bien devinez quoi ? Et oui, elle est fermée. Bon, quand on arrive après l’heure de fermeture, encore, on se fait une raison, on se dit qu’on ne peut s’en prendre qu’à soi-même, qu’on aurait dû se renseigner avant… Sauf que là,c’est une fermeture exceptionnelle : l’épicière a fermé son magasin à la mi-journée, cinq heures plus tôt que d’habitude, ce n’est donc pas moi qui suis en tort. Bon, elle a sûrement ses raisons et j’en serai quitte pour repasser mardi, mais décidément, le destin a une dent contre moi en ce moment…

20h50 : Pour des raisons qui ne regardent que lui, mon scanner a décidé de faire la grève sauvage et sans préavis. J’ai donc perdu une demi-heure avant de trouver un moyen de le ramener à de meilleurs sentiments… L’informatique me tuera ! En attendant, j’en ai plus qu’assez de tous ces contretemps : je vais me mettre au lit, c’est le seul endroit où je n’ai pas d’ennuis !

Dimanche 17 juillet

Le journal du professeur Blequin (209)

20h15 : Il m’a fallu attendre pendant presque deux heures que la mer soit assez haute pour nager, le tout en supportant les cris incessants des morveux… Je n’aurais jamais cru que je l’écrirais un jour, mais je commence à me lasser ! C’est bon signe, ça veut dire que j’en ai déjà profité bien à fond et que je n’aurai pas de regrets quand la météo deviendra moins estivale et plus typique de la région. On annonce de l’orage pour la semaine qui vient : au vu de l’état des pelouses, ce sera plus une source de soulagement qu’autre chose ! Me replier un peu sur mon cocon en attendant de rejoindre mes parents en Sarthe ne me fera pas de mal : peut-être même que j’aurai moins de problèmes !

Lundi 18 juillet

12h55 : La série noire continue. Recevoir un message de refus d’un éditeur, ce n’est déjà pas drôle, mais si, en plus, la technique vous met des bâtons dans les roues et vous empêche de faire une nouvelle tentative avec une autre maison, vous vous demandez carrément si une sorcière ne vous pas jeté un sort ! Mais ça m’étonnerait quand même un peu car je ne connais aucune sorcière à Brest – à part Bernadette Malgorn, bien sûr, mais si elle avait des pouvoirs magiques, elle ne perdrait pas systématiquement les élections. Décidément, plus le temps est estival, plus j’ai d’emmerdes ! J’hésite presque à sortir…

Le journal du professeur Blequin (209)
14h30 : J’y suis quand même allé ; au niveau du Fort Montbarey, toute une faune d’adolescents rigolards monte dans le bus. Chaleur, bruit, foule… Et il va falloir se taper tout ça pendant une demi-heure à cause de la déviation ? Ah non, je ne tiendrai pas deux secondes ! Alors je descends à la station « Château d’eau », là où le bus est censé tourner en temps normal et je continue à pied : en me voyant sortir du véhicule, les gamins rient de mon dos maculé de sueur ; excédé, je leur lance « De quoi je me mêle ? » Evidemment, marcher sous le cagnard n’est pas une expérience des plus agréables, surtout quand on emprunte une route peu sûre pour les piétons, mais tant pis, je n’aurais pas supporté plus longtemps cette promiscuité qui me rappelait trop les années noires du collège ! D’ailleurs, malgré la chaleur et mes sandales à l’agonie, je me surprends à pousser un soupir de soulagement : il me semble qu’il y avait déjà des siècles que je n’avais plus eu l’occasion de déambuler en extérieur dans le calme, sans touristes qui parlent fort ni mioches qui piaillent…
Le journal du professeur Blequin (209)

20h : Après un bon bain de mer, j’ai bu une pinte en terrasse en bas de Siam : il m’a fallu ensuite remonter la rue à pied, la circulation du tram étant interrompue pour cause de canicule… Sincèrement, j’ai un peu de mal à saisir le lien de cause à effet ! D’un autre côté, s’ils ne climatisaient pas comme des dingues, ils consommeraient moins d’énergie et ils ne seraient peut-être pas contraints à ce genre de coupure ! Je dîne sur la terrasse d’une pizzeria de la place de la Liberté : je risque de temps en temps un œil sur la télé qui diffuse BFM TV en continu. Apparemment, les incendies en Gironde ont été très violents : ils ont déjà brûlé le Covid et le gouvernement qui ont disparu de l’actualité ! Plus sérieusement, il parait que les cinq campings du Pilat ont été détruits : c’est bien la première fois qu’il se passe quelque chose d’intéressant dans un camping ! Si Reiser pouvait rire dans sa tombe, il s’esclafferait en disant que ça venge des paysages bousillés ! L’un de ces campings est celui où avait été tourné le film avec Dubosc : chouette, la nature venge même le cinéma français des navets qui lui font honte !

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Mardi 19 juillet

11h30 : Depuis vendredi, impossible de me lever avant onze heures, c’est comme si j’avais des siècles de sommeil à rattraper depuis ma mésaventure due au feu d’artifice. La chaleur n’arrange évidemment rien. Ce matin, l’orage annoncé a enfin éclaté : à présent, le ciel est couvert et l’atmosphère est redevenue respirable. Il y a quelques années encore, une telle météo m’aurait déprimé : aujourd’hui, ça a plutôt tendance à me soulager ! D’autant que je connais des gens, plus au sud, qui doivent m’envier…

15h : Je passe à la boutique sur laquelle je m’étais cassé les dents samedi dernier : la patronne n’est manifestement pas disposée à m’exposer les raisons de sa fermeture prématurée, je n’insiste donc pas, mais je tique quand elle me dit qu’elle l’avait annoncée… Sur les réseaux sociaux ! Encore une fois, j’ai été pénalisé parce que je ne possède pas de smartphone : cette époque me tue à petit feu…

Mercredi 20 juillet

10h : Enfin levé à une heure décente, j’ai des courbatures partout. Rien d’étonnant : hier, pour la première fois depuis plus d’une semaine, je ne suis pas allé nager, j’ai donc laissé mes muscles (ou ce qui en tient lieu dans mon corps délabré) se refroidir et je sens enfin la douleur accumulée… Je sors néanmoins faire quelques achats : il fait bon mais il bruine. On ne peut évidemment pas s’en plaindre après les grosses chaleurs qu’on a eues dernièrement, mais je doute fort que ces pluies fines suffisent à réhydrater des terres qui en ont cruellement besoin. En attendant, le climat de la région ressemble de plus en plus à celui de la Floride et ça ne me dit rien qui vaille…

Jeudi 21 juillet

Le journal du professeur Blequin (209)
Croquis pris à Bellevue il y a deux ans.

10h30 : Mal réveillé à l’issue d’une nuit mitigée au cours de laquelle j’ai fait un rêve d’une médiocrité digne d’un film français, je me rends au marché de Bellevue. Il a bien lieu aujourd’hui, ouf ! Mais le marchand de montres n’est pas là… Renseignement pris auprès d’un brocanteur arabe, quand vient l’été, ce monsieur fait son business sur les côtes histoire de profiter de la manne touristique. Bah, il faut bien que les doryphores servent à quelque chose… En attendant, histoire de ne pas m’être une nouvelle fois déplacé pour rien, je risque un tour au centre commercial du quartier : miracle, je tombe sur une carterie où il y a bien des montres dans une vitrine ! Pour ne pas me faire avoir, je demande à une vendeuse si elles marchent et si je ne vais pas devoir aller acheter une pile ailleurs : elle a l’air de très mal le prendre ! C’est peut-être dû au ton que j’emploie, il est tout à fait envisageable que ma lassitude morale ait eu quelque peu raison de mon amabilité… Comme les montres sont toutes au même prix, j’en achète une avec un bracelet élastique : c’est seulement en plein air que je remarque les paillettes dont le cadran est « orné » et que je n’avais pas vues sous la lueur blafarde qui éclairait la boutique ! Je trouve ça d’une vulgarité affligeante, mais bon, j’ai enfin une montre au poignet et je ne lui demande guère plus que tenir jusqu’à la Noël. Il n’empêche que je rentre avec un certain sentiment de frustration : je me console en me disant qu’à présent que j’ai une toquante, je n’ai pour ainsi dire plus d’impératifs jusqu’à mon départ en Sarthe. Mes ennuis sont-ils enfin terminés ?

Le journal du professeur Blequin (209)
Eléonore Duhennois

20h : De retour à La Raskette, j’interprète quatre slams dont un tout neuf, écrit tout juste avant de partir, en hommage à Amélie Nothomb. Je me surprends à bafouiller nettement moins qu’avant : visiblement, ma stratégie pour améliorer ma diction porte ses fruits. Après ma prestation, Eléonore, l’animatrice, improvise avec deux musiciens sur trois fables de La Fontaine ! Voilà typiquement le genre de grand moment qu’on ne peut vivre que dans le cadre des scènes ouvertes : comme quoi, pour vivre des heures inoubliables, on n’a pas besoin de dépenser des fortunes pour avoir le droit de s’entasser avec des centaines de blaireaux dans des hangars où se produisent des artistes qui passent à la radio ou à la télé à longueur de journée ! Il suffit d’un minimum de curiosité intellectuelle pour découvrir gratuitement, dans des salles à taille humaine et en compagnie de gens de bien, des créateurs de talent qui osent sortir des sentiers battus… Je ne peux m’empêcher d’offrir à Eléonore un dessin où elle figure en corbeau et moi en renard ! Au cours de la soirée, un musicien me paie pour le caricaturer, lui et son collègue, pendant qu’ils sont sur scène : le résultat les enchante, même si le collègue trouve que je lui donne un faux air à François Hollande ! Je réponds que ça vaut mieux que ressembler à Eric Zemmour…

Vendredi 22 juillet

Le journal du professeur Blequin (209)

18h : Je reviens de la plage. La déviation qui emmerdait tout le monde n’est plus d’actualité et j’y suis arrivé en trois quarts d’heure, comme au bon vieux temps. Il n’y avait pas foule, il y avait même peu de gens qui se risquaient dans l’eau, il était pourtant facile d’y entrer car la différence de température avec l’air était moindre que pendant la canicule. Bref, tout s’est bien passé, c’est même la première fois depuis longtemps que tout va comme sur des roulettes quand je passe la journée dehors ! Est-ce la fin de la série noire ? Je crois tout de même les doigts pour que rien ne remette en cause mon départ en Sarthe début août : avec tout ce qui nous est tombé dessus depuis deux ans, je m’attends à tout, désormais !


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