La visite effectuée ce jeudi en Libye par les Tombeurs du « Guide » a eu certes le mauvais côté de trop, celui de trop ressembler à une opération de communication de style hollywoodien. J’imagine que de nombreux grincheux ou jaloux attendent déjà que la situation politique se détériore pour brocardé le Président français et le Premier Ministre anglais. Tout ceci étant dit, reconnaissons tout de même que les deux héros du jour méritent l’accueil triomphal qui leur a été réservé par des dizaines de milliers de Libyens. Il a été la hauteur des risques encourus il y a six mois quand aucun autre chef d’Etat ou de Gouvernement n’avait eu le même courage. Le raisonnement pessimiste, qui consiste à critiquer chaque décision politique sur base des risques qu’ils font courir, a ses limites. Il est bon de rappeler qu’avec la chute du Tyran de Tripoli, le risque d’islamisation est réel, tout comme le risque de voir les groupes armés incontrôlés sévir dans tout le Sahel aussi. Il y a également un risque de voir les nombreuses tribus libyennes, tenues depuis des décennies par la main de fer kadhafiste, chercher plus d’autonomie sinon réclamer l’indépendance. Tout ceci existe, mais ne peut servir de justifications posthumes de la lâcheté de ceux qui ont choisi de rester passifs quand le peuple libyen se soulevait..
La France, qui dans cette affaire avait parfaitement saisi le sens de l’histoire, ne devrait nullement avoir de complexe quand il s’agira de concourir pour l’obtention des marchés liés à la reconstruction de ce pays. Il n’y a rien de répréhensible, tant sur le plan politique que sur le terrain de la morale. J’imagine que peu de gens auraient dénié ce droit aux sociétés américaines après la libération de l’Europe de l’Ouest par les Gis. Ce qui serait néfaste pour toutes les parties, c’est qu’il y ait des accords cachés, des paiements secrets, ou des passe-droits honteux. Pour le reste, la France et la Grande-Bretagne se ridiculiseraient si une nouvelle fois ce sont les entreprises chinoises qui raflent l’essentiel des marchés de reconstruction comme elle a l’habitude de le faire sur le continent africain. Le pays du Soleil levant qui se targue de ne jamais s’immiscer dans les affaires politiques des autres Etats, est tout de même un des pays qui soutenaient le plus le régime de Kadhafi, tout comme il soutient à bout de bras Mugabe au Zimbabwe ou Omar El-Béchir au Soudan… Le seul critère qui devrait s’imposer à tous dans ces affaires, c’est de savoir si les entreprises en question vendent des produits ou rendent des services licites conformément à leur objet social ; ou si elles sont uniquement dans ces pays pour faire du business tout en soutenant des dictatures immondes comme le fait le groupe Total en Birmanie.
Le beau discours de Sarkozy à Benghazi et le triomphe qu’il reçut en réponse, augurent peut-être d’une fructueuse et vertueuse relation économique entre la nouvelle Libye et la France. L’avenir nous le dira.