Magazine Journal intime

Proust et Frankenstein

Publié le 20 mai 2020 par Dcmky

Le soir du dimanche 10 novembre 1912, Marcel Proust, qui va de déconvenue en déconvenue avec les éditeurs, écrit à Mme Straus :

' J'ai tellement l'impression qu'une œuvre est quelque chose qui sorti de nous-même, vaut cependant mieux que nous-même, que je trouve tout naturel de me démener pour elle, comme un père pour son enfant.'

Marcel Proust n'a pas eu d'enfant, son grand livre fit toute sa progéniture.

Je trouve touchante cette modestie qu'on sent chez lui, toujours, devant son œuvre.

Les hommes deviennent peu de choses devant leur œuvre dès lors qu'ils réussissent à extirper de leurs entrailles le meilleur de ce qu'ils ont senti - c'est paradoxal, mais le plus grand créateur, une fois son but atteint, se voit immédiatement condamné à rentrer dans l'ombre, à s'effacer devant la créature qui vient de sortir de lui: s'il a bien travaillé, tout de suite elle prend toute la place.

Marcel Proust a tout fait pour que sa créature soit plus grande que lui, il y réussit si bien que son œuvre immédiatement l'efface, le laisse en plan, lui, l'homme, et nous on reste un peu triste de le voir ainsi relégué aux oubliettes par la comète qu'il a lancée.

Ce que je dis là Proust en avait pleinement conscience, c'est tout le sens finalement de son 'Contre Sainte-Beuve'.

Je disais donc que Proust y réussit si bien que... bien sûr on a envie de tout savoir de lui.

Heureusement, Jean-Yves Tadié est passé par là...

... et je ne saurai trop vous recommander de lire, si ce n'est déjà fait, la biographie définitive qu'il a consacré à Marcel Proust.


Proust et Frankenstein

En marchant tout à l'heure dans la rue, me vient aux lèvres, sans prévenir, ce petit bout de 'l'Aventurier':

'... Avec l'ami Bill Balantine Sauvé de justesse des crocodiles'

Dans toutes ces histoires de super-héros, voilà bien ce qui au fond n'est pas tolérable: ce 'de justesse'.

Les super-héros sont systématiquement sauvés de justesse. A force de tant défier les lois de la probabilité, cela en devient vraiment déprimant, comme une insulte persistante à l'intelligence.

Je ne peux éprouver ni tendresse véritable ni sympathie pour ce genre de robots toujours artificiellement sauvés de justesse. Des robots? Pas des hommes en tout cas.


Du coup - du coup, mais allez vraiment savoir pourquoi - je me rappelle une phrase de C. qui m'avait, à l'époque où il l'avait prononcée, extraordinairement troublé.

Nous avions vingt ans, et, la soirée s'imprégnant d'un soupçon de nostalgie, nous en étions arrivés à ce point où défilait devant ...

Proust et Frankenstein

Si on décide par exemple de dénombrer les matrices carrées de taille n comportant exactement deux '1' dans chaque ligne et dans chaque colonne ( avec partout ailleurs des zéros), c'est pour moi un problème neuf. Je n'y ai jamais réfléchi et peut-être même que personne avant moi n'y a réfléchi. Pourtant, on sent qu'il y a des relations à découvrir, on sent qu'il existe des liens originels. Je n'ai pas d'inquiétude: il existe forcément des choses à voir, à remarquer, à prouver. Les relations, les propriétés, les théorèmes concernant ce problème sont là depuis toute éternité comme la momie d'un pharaon dans une tombe restée inviolée: ils nous attendent, ils ne demandent qu'à être cueillis, ils ont été installés pour ainsi dire à l'aplomb de ce sujet avant même la venue sur terre du premier homme. Tout est là depuis toujours, des choses nous attendent dans l'ombre, il suffit de les découvrir. Les mathématiques ne sont pas un grand livre à f...

Proust et Frankenstein

Je remercie Franck Antunes qui se trouve de fait à l'origine de cet article.

J'ai découvert, ce matin, la page de Franck à la faveur d'un billet qu'il a publié sur Le Club de La Cause Littéraire au sujet de sa lecture de 'John Barleycorn' de Jack London (1913).

Parcourant son mur, je découvre qu'il est fan de Bruce Springsteen, ce qui nous fait un point commun. Voulant me manifester auprès de lui, autrement que par un simple 'j'aime', j'ai écrit la première chose qui m'est passé par l'esprit, à savoir que je lui recommandais la lecture de 'Born To Run' l'autobiographie du Boss. Ce conseil - assez inutile car Franck a l'air d'être un vrai fan - m'a immédiatement fait repenser au grand hêtre pourpre.

Voilà ce que Springsteen en écrit vers la la fin de 'Born To Run', presqu'en guise de conclusion :


' Un soir de novembre, dans la période où j'écrivais ce livre, j'ai pris une fois de plus la voiture ...


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